17.11.04
Partenariat à la Chambre des Lords -- en direct
Depuis plus de deux heures je regarde sur le site du Parlement britannique le débat de la Chambre des Lords sur le partenariat enregistré (civil partnership) pour les couples de même sexe. Très mauvais pour les nerfs!
Invitée à se rallier à la version adoptée par les Communes (massivement, tous partis confondus), la Chambre des Lords est saisie d'un amendement qui reformule, et de manière plus habile, la précédente tentative de dévier la loi de son but en étendant le cercle des bénéficiaires à d'autres que les couples de même sexe. Confrontée au refus des Communes et aux arguments techniques opposés à sa version précédente (que les Lords avaient approuvée), la baronne O'Cathain propose la main sur le coeur une simple délégation au gouvernement pour établir un régime "parallèle" (et simplifié, excluant des éléments comme les assurances sociales) pour les membres d'une même famille en ligne directe qui le souhaiteraient, avec l'exemple de deux soeurs vivant ensemble.
Le raisonnement avancé, et repris comme une évidence par de nombreux orateurs, est que la loi, en remédiant à une injustice faite aux couples de même sexe, créerait une injustice à l'égard de ces parents qui, eux non plus, ne peuvent pas se marier ensemble [mais ils peuvent en revanche potentiellement être mariés ou partenaires de leur côté, contrairement à des partenaires enregistrés auxquels on prétend les assimiler, ndla]. Comme d'autres orateurs le font remarquer, la loi ici répare une injustice, s'il y en a d'autres à réparer également ce n'est pas elle qui les créé -- mais visiblement elle exacerbe un sentiment d'envie alors que la prétendue injustice existait déjà auparavant par rapport à un couple marié! Lord Tebbit, homophobe patenté, vient d'en faire la démonstration, n'hésitant pas à, simultanément, utiliser la tragédie personnelle de l'attentat de l'IRA qui, il y a 20 ans, l'a sévèrement blessé et a laissé sa femme invalide, et trivialiser la nature de la relation entre partenaires de même sexe: si j'étais décédé et que c'était un de nos enfants qui avait pris en charge les soins de leur mère, dit-il, au décès de celle-ci il n'aurait aucun droit particulier; si j'avais été laissé veuf et que je m'étais alors mis en partenariat avec un homme rencontré peu avant, à mon décès il aurait tous les droits [mais c'est la même chose en cas de remariage, ndla], c'est une inégalité injuste.
L'hypocrisie est patente même si elle n'est pas soulignée par le gouvernement et les adversaires de l'amendement, qui pour la plupart jouent sur le registre de la compréhension à l'égard de ce "problème réel", qui doit être traité pour lui-même (ce qui permettra d'ailleurs d'étendre une solution à tous les "carers", également ceux qui ne sont pas apparentés à la personne soignée à plein temps). Seule la baronne Howarth of Breckhard fait remarquer que, dans le contexte d'une série récente d'agressions homophobes à Londres, le vote d'un tel amendement (qui empêcherait la loi d'être adoptée d'ici la fin de la session parlementaire, demain) ne pourrait que renforcer l'image négative d'une Chambre des Lords déconnectée de la réalité.
Le débat est maintenant terminé après une intervention ferme et exhaustive de la représentante du gouvernement sur ce dossier, la baronne Scotland of Asthal (elle s'est offert le petit plaisir de "moucher" Tebbit qui, comme la coutume le permet, l'interrompait par une question se voulant perfide; il persévère dans la finesse en évoquant "deux frères homosexuels").
Le vote se déroule ensuite par la "division" de la Chambre, dont les membres quittent l'enceinte par deux portes différentes selon qu'ils approuvent ou refusent l'amendement... Il est refusé, et même nettement (251 à 136) -- comme quoi il est des débats qu'il vaut mieux pour sa sérénité ne pas suivre en direct! La suite est "poutzée" en 5 minutes, les Lords se rallient sans mot dire aux 94 divergences introduites par la Chambre des Communes. La loi peut maintenant être promulguée par la reine, elle entrera en vigueur à une date qui sera fixée par le gouvernement. Hourra! (En Suisse, le souverain c'est le peuple et ce sera le 5 juin).
Invitée à se rallier à la version adoptée par les Communes (massivement, tous partis confondus), la Chambre des Lords est saisie d'un amendement qui reformule, et de manière plus habile, la précédente tentative de dévier la loi de son but en étendant le cercle des bénéficiaires à d'autres que les couples de même sexe. Confrontée au refus des Communes et aux arguments techniques opposés à sa version précédente (que les Lords avaient approuvée), la baronne O'Cathain propose la main sur le coeur une simple délégation au gouvernement pour établir un régime "parallèle" (et simplifié, excluant des éléments comme les assurances sociales) pour les membres d'une même famille en ligne directe qui le souhaiteraient, avec l'exemple de deux soeurs vivant ensemble.
Le raisonnement avancé, et repris comme une évidence par de nombreux orateurs, est que la loi, en remédiant à une injustice faite aux couples de même sexe, créerait une injustice à l'égard de ces parents qui, eux non plus, ne peuvent pas se marier ensemble [mais ils peuvent en revanche potentiellement être mariés ou partenaires de leur côté, contrairement à des partenaires enregistrés auxquels on prétend les assimiler, ndla]. Comme d'autres orateurs le font remarquer, la loi ici répare une injustice, s'il y en a d'autres à réparer également ce n'est pas elle qui les créé -- mais visiblement elle exacerbe un sentiment d'envie alors que la prétendue injustice existait déjà auparavant par rapport à un couple marié! Lord Tebbit, homophobe patenté, vient d'en faire la démonstration, n'hésitant pas à, simultanément, utiliser la tragédie personnelle de l'attentat de l'IRA qui, il y a 20 ans, l'a sévèrement blessé et a laissé sa femme invalide, et trivialiser la nature de la relation entre partenaires de même sexe: si j'étais décédé et que c'était un de nos enfants qui avait pris en charge les soins de leur mère, dit-il, au décès de celle-ci il n'aurait aucun droit particulier; si j'avais été laissé veuf et que je m'étais alors mis en partenariat avec un homme rencontré peu avant, à mon décès il aurait tous les droits [mais c'est la même chose en cas de remariage, ndla], c'est une inégalité injuste.
L'hypocrisie est patente même si elle n'est pas soulignée par le gouvernement et les adversaires de l'amendement, qui pour la plupart jouent sur le registre de la compréhension à l'égard de ce "problème réel", qui doit être traité pour lui-même (ce qui permettra d'ailleurs d'étendre une solution à tous les "carers", également ceux qui ne sont pas apparentés à la personne soignée à plein temps). Seule la baronne Howarth of Breckhard fait remarquer que, dans le contexte d'une série récente d'agressions homophobes à Londres, le vote d'un tel amendement (qui empêcherait la loi d'être adoptée d'ici la fin de la session parlementaire, demain) ne pourrait que renforcer l'image négative d'une Chambre des Lords déconnectée de la réalité.
Le débat est maintenant terminé après une intervention ferme et exhaustive de la représentante du gouvernement sur ce dossier, la baronne Scotland of Asthal (elle s'est offert le petit plaisir de "moucher" Tebbit qui, comme la coutume le permet, l'interrompait par une question se voulant perfide; il persévère dans la finesse en évoquant "deux frères homosexuels").
Le vote se déroule ensuite par la "division" de la Chambre, dont les membres quittent l'enceinte par deux portes différentes selon qu'ils approuvent ou refusent l'amendement... Il est refusé, et même nettement (251 à 136) -- comme quoi il est des débats qu'il vaut mieux pour sa sérénité ne pas suivre en direct! La suite est "poutzée" en 5 minutes, les Lords se rallient sans mot dire aux 94 divergences introduites par la Chambre des Communes. La loi peut maintenant être promulguée par la reine, elle entrera en vigueur à une date qui sera fixée par le gouvernement. Hourra! (En Suisse, le souverain c'est le peuple et ce sera le 5 juin).