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27.2.04

Kerry sur le mariage gay

Je ne peux pas dire que John Kerry m'enthousiasme comme candidat démocrate à la Maison-Blanche... Mais face à l'hystérie que développent tant les adversaires de toute visibilité pour les gays et les lesbiennes que des partisans à l'esprit carré, à la suite de l'activisme de la Cour suprême du Massachusetts et de la provocation du maire de San Francisco (je ne trouve pas très digne tous ces couples qui se précipitent pour ramasser ce qu'ils savent être de la fausse monnaie, et j'entends déjà ceux qui approuvent se récrier le jour ou un maire distribuera des permis de port d'arme illégaux parce qu'il estime, lui, que c'est constitutionnel), sa position me paraît juste, à la fois progressiste et raisonnable:
-- un amendement à la Constitution de l'Etat du Massachusetts précisant que le mariage civil est une institution entre deux personnes de sexe opposé;
-- dans le même amendement, la garantie que les couples de même sexe ont accès à une institution similaire, le partenariat enregistré (civil union) -- comme c'est le cas dans le Vermont de Howard Dean et selon le modèle danois qui se généralise en Europe.

Je me console en voyant deux côtés positifs au débat:
-- Les adversaires de la visibilité des gays et des lesbiennes (qui ne font à cet égard aucune différence entre mariage et partenariat) n'ont aucune chance de l'emporter au niveau fédéral, vu l'opinion publique et la lourdeur de la procédure d'approbation d'un amendement constitutionnel tel que le soutient Bush; ils vont démontrer leur faiblesse.
-- Le droit à la vie et à la liberté individuelle des homos des deux sexes est loin d'être remis en cause (il est au contraire relégitimé) par l'existence même de ce débat et son sujet byzantin, alors que dans tant de régime dit "progressistes" (la Palestine de Yasser Arafat, par exemple) les gays sont menacés, persécutés, tués.

24.2.04

Exhibitionnisme compassionnel

Enfin quelqu'un qui s'est donné la peine de théoriser ces nouvelles formes d'émotions collectives dont l'apparition remonte sans doute au décès de la princesse Diana, mais dont les manifestations se multiplient, auto-alimentées par les médias. C'est dans un Guardian ramassé à l'aéroport que je découvre l'étude de Patrick West publiée par l'Institut pour l'étude de la société civile Civitas.

Le phénomène s'amplifie: en Angleterre, les traditionnelles 2 minutes de silence pour les manifestations de souvenir sont devenues 3 au lendemain du 11 septembre 2001, 5 pour une adolescente assassinée, 5 également pour les victimes d'une catastrophe ferroviaire, et 10 pour la victime d'un crime raciste.

L'auteur dénonce le profond narcissisme de cette ostentation du coeur et de la sensibilité, qui vise à se faire du bien plutôt qu'à faire du bien.

Et il élargit le propos au domaine politique en soulignant combien le slogan Not in My Name (pas en mon nom) contre l'intervention en Irak manifeste surtout une forme d'individualisme consumériste. Que l'on pense aussi à ces réconfortants déploiements de drapeaux Pace, ou à la complaisante identification avec le sort des Palestiniens, qui ne font strictement rien pour faire avancer la cause à laquelle on prétend tenir.

21.2.04

Démographie et polémique

Peut-être fais-je preuve d'une méfiance paranoïaque; mais la page du Monde de ce jour, sur la base d'un bilan démographique 2003 publié par l'Institut national français de la statistique et des études économiques (INSEE) me paraît poser plus de questions qu'elle n'apporte de réponses.

Poursuivant sur la voie de la dénonciation des victimes de la canicule de l'été dernier, le journal souligne qu'on a enregistré 549'600 décès en France métropolitaine en 2003, soit 15'517 morts de plus qu'en 2002 (+ 3%). Et de publier une "courbe de la mortalité depuis 1946" montrant qu'elle remonte depuis 2000 (avec une forte accélération en 2003) alors qu'elle diminuait depuis les années 70 et 80. Je veux bien, mais la variation du nombre de morts en valeur absolue, sans la situer en regard de la population totale, ne me paraît pas pouvoir signifier grand chose (l'étude de l'INSEE [pdf | 273ko], elle, donne le taux: il est passé de 8,9 morts pour 1000 habitants à 9,1, ce qui était par exemple le taux des années 95 à 99). Et la mort n'est tout de même pas de même nature que la courbe des accidents de la route, où il est légitime de vouloir tendre vers 0 et donc se féliciter de toute diminution et s'inquiéter de toute augmentation.

C'est ainsi que, dans un tableau, Le Monde donne une donnée qui me paraît significative: de 1994 à 2003, la proportion des personnes de 65 ans et plus est passée de 14,6% à 16,1%: cela signifie un accroissement de 10,27% de la part de ce groupe d'âge...

Dans un autre genre, je ne peux m'empêcher de trouver suspecte la mise en avant du nombre cumulé de PaCS depuis fin 1999 (100'000) alors que pour le mariage ce sont les chiffres annuels qui sont donnés: 273'300 mariages en 2002 et 25'000 PaCS la même année (précision: le PaCS est une institution conférant des droits limités aux couples homos ou hétéros).

A la décharge du Monde (dont le travail s'est limité à décalquer sa source), mais à la charge de l'INSEE: en réalité, ces approximations sont dans la présentation de l'étude elle-même, où manifestement le souci de mettre en valeur la communication l'emporte sur le scrupule scientifique.

19.2.04

La fumée rend-elle invincible, ou sourd?

A la maison, nous lisons le très conservateur Daily Telegraph: c'est peut-être pervers, mais que je puisse être en désaccord avec certains éléments du contenu d'un journal de droite me laisse parfaitement froid, ce qui ne serait pas le cas avec The Guardian. Et en réalité n'importe quel grand quotidien de qualité publie, sur la durée, une information complète et des reportages et points de vue stimulants et diversifiés.

Mardi 17, le Telegraph a publié l'un de ces éditos libertaro-populistes dont il a le secret. Cette fois, pas pour dénoncer le scandale des sanctions qui frappent ceux qui commettent des infractions au code de la route, mais pour louer le gouverneur Schwarzenegger de créer une cour à ciel ouvert dans ses bureaux afin de pouvoir y fumer le cigare en conformité avec une législation californienne draconienne. Ca nous vaut le lendemain un courrier approbateur (Puffing for victory) d'un lecteur de Hong Kong, qui souligne:

"Pontificating anti-smokers should be reminded that we enjoy relative world peace today thanks to servicemen who - in combat and in the trenches - relied for comfort on cigarettes, nearly a billion of which were dispensed in the two world wars."

La réponse n'a pas tardé: dans le journal d'aujourd'hui (Smoking guns), un lecteur observe que cette arme secrète ne doit pas avoir été décisive, puisqu'elle était également disponible des deux côtés; un autre remarque que la masturbation était sans doute également pratiquée de manière extensive par les soldats, mais de là à lui attribuer la sauvegarde du monde libre...

Le désagrément que représente la fumée est l'une de ces questions sur lesquelles, même si j'ai une pratique en réalité tolérante, j'ai un point de vue très tranché, et depuis longtemps: au collège, je m'étais attiré, disons, une notoriété (plutôt qu'une popularité) certaine en distribuant un tract réclamant l'interdiction de fumer dans la cafétéria. La loi californienne est probablement excessive en ne prévoyant pas d'exception, car la cour à ciel ouvert ne me paraît pas adéquate pour une activité à pratiquer, seul ou entre adultes consentants, exclusivement dans un lieu clos et dédié à cet effet, à mon avis.

13.2.04

Sullivan sublime

Je trouve politiquement malencontreuse la position d'Andrew Sullivan, qui divise en revendiquant le mariage civil lui-même pour les gays et les lesbiennes plutôt que de rechercher un large consensus autour d'un statut de partenariat pour les couples de même sexe; mais je la comprends désormais un peu mieux.

L'hebdomadaire Time publie un article de lui que j'ai trouvé très émouvant: je me retrouve largement dans son histoire personnelle (il a pourtant neuf ans de moins que moi!). Il sort des questions techniques (juridiques, politiques ou même éthiques) pour illustrer puissamment le coeur du sujet: l'épanouissement personnel reconnu par sa famille et ses proches auquel un gay ou une lesbienne aspire comme toute personne humaine. A lire absolument.

A lire aussi la réaction d'un lecteur de 17 ans (Email of the day): comme quoi aujourd'hui encore le coming out n'est pas évident.

11.2.04

Armes de destruction massive: chat échaudé craint l'eau froide (mais c'est évidemment illogique)

Dans Le Temps d'aujourd'hui, Joëlle Kuntz présente ses états d'âme: après l'absence d'armes de destruction massive en Irak, elle en vient à mettre en doute l'existence de celles à laquelle la Lybie est en train de renoncer. Et elle brode joliment sur le thème de la confiance, de la vérité et de la désillusion.

Je suis de ceux qui étaient persuadés qu'après l'intervention, il faudrait alors répondre à ceux qui prétendraient que les armes et laboratoires découverts étaient plantés là par les Américains... C'est dire si je suis surpris et "déçu" que l'on n'ait pas trouvé de quoi rallier au moins les sceptiques honnêtes. Qui trouvent cependant dans le rapport de David Kay amplement de quoi se convaincre de la réalité des intentions du régime de Saddam Hussein en la matière, dès que la communauté internationale se serait lassée de le tenir sous contrôle, conformément aux voeux des gouvernements français ou allemand et des opinions publiques défaitistes (qui ne voulaient pas des conséquences que Saddam faisait supporter à son peuple de l'isolement du pays, mais ne voulaient pas non plus les en libérer).

Mais je n'ai jamais fait des armes de destruction massive le point cardinal de mon soutien à la politique de Bush et Blair visant, après le 11 septembre 2001 (et déjà avant, pour ce qui concerne Blair: voir ce discours du 22 avril 1999 à Chicago, sous la présidence Clinton), à ramener dans la communauté internationale ces Etats naufragés qui présentent désormais un trop grand risque par le potentiel qu'ils peuvent apporter au terrorisme contre les démocraties. Et si c'est sur ce point que l'accord diplomatique s'est fait autour de la résolution 1441 du Conseil de sécurité, c'est d'abord parce que la France, en particulier, jugeait que c'était une crainte fondée mais ne voulait pas endosser un programme plus musclé (regime change). Car il faut quand même rappeler deux évidences:
-- Saddam a toujours poursuivi l'ambition de doter son régime d'armes atomiques, bactériologiques et chimiques: il a détenu certaines de ses armes et les a utilisées dans le passé aussi bien en Irak même que dans ses guerres avec ses voisins, et rétrospectivement c'est probablement à l'invasion du Koweit que nous devons le fait qu'il ne soit pas parvenu à ses fins;
-- Tout le monde, absolument tout le monde (y compris Chirac), était convaincu de leur existence en 2002.

C'est dire que la question n'est pas celle de la "vérité" (opposée au prétendu "mensonge"), mais celle de l'établissement des "faits" et des raisons qui expliquent ce qu'il faut bien appeler une monumentale "erreur": de quoi engendrer de la colère, peut-être, mais pas des doutes existentiels. Comme je l'ai déjà écrit, l'hypothèse qui me plaît le mieux pour le moment aurait fait la fortune d'un Le Carré de la grande époque (avant qu'il ne disjoncte, comme en témoignent ses deux derniers livres): une conjonction d'(auto)intoxication entre les services irakiens (vis-à-vis de Saddam Hussein), Saddam (vis-à-vis de l'extérieur, voire de l'intérieur) -- comme semblent l'attester les témoignages recueillis par la Coalition, où chaque unité déclare ne pas en avoir eu tout en étant persuadée que d'autres en avaient... -- et les services de renseignement occidentaux (vis-à-vis des autorités).

J'ai donc la chance d'échapper aux troubles psychosomatiques ressentis par Joëlle Kuntz... Je ne peux que lui recommander de respirer profondément et de prendre un point de vue plus large sur la question, en se réjouissant sans restriction de la libération des Irakiens d'un régime de terreur et des effets positifs sur le plan stratégique qui sont sensibles tant au Proche-Orient que dans le reste du monde. Mais cela demandera encore beaucoup d'effort et de résolution de la part des démocraties!

A signaler sur la même page du Temps deux autres articles qui tentent de racheter ce qu'on lit en page rédactionnelle (accessibles seulement aux abonnés):
-- Pourquoi la guérilla irakienne n'est jamais devenue un mouvement de résistance, par Ludovic Monnerat (celui de CheckPoint);
-- L'hystérie anti-américaine tient lieu d'évangile pour toute une génération de faiseurs d'opinion européens, par Pierre-Alain Avoyer.

10.2.04

Couples de même sexe: consensus pour le partenariat

Alors que l'Amérique se déchire entre ayatollahs du mariage gay (Sullivan) et talibans de la protection du mariage (hétéro), en Europe le modèle danois triomphe: c'est maintenant le leader de l'opposition conservatrice britannique, Michael Howard, qui annonce qu'il votera le Civil Partnerships Bill.

Regard français sur le sein de Janet Jackson

A propos de l'affaire qui a ému la blogosphère américaine, une intéressante réflexion dans Le Monde de ce matin, appuyée sur le tableau de Delacroix Le 28 juillet 1830: la Liberté guidant le peuple. La conclusion:

"L'Amérique profonde se révèle ainsi périodiquement prude. Comme certaines de ces jeunes filles de France qui, par souci de pudeur, se protègent des regards en portant le voile islamique. Pour disparaître de la scène du désir et de la liberté. Pour s'effacer. Au risque d'attirer les regards."

Pour ma part c'est Justin Timberlake qui a attiré mon regard à cette occasion...

8.2.04

Routine de la démocratie directe: les résultats de la votation de ce jour

Particulièrement à l'intention des lectrices et lecteurs étrangers, j'avais précédemment présenté les objets au programme de la votation d'aujourd'hui, au niveau fédéral et au niveau genevois. Le scrutin s'est terminé à midi et les résultats sont les suivants:

CH: Le contreprojet à l'initiative Avanti (politique des transports) est rejeté par 62,8% des voix et 20,5 cantons sur 23 (il aurait fallu une double majorité car c'était une modification de la Constitution).

CH: La modification du droit du bail est rejetée par 64% des voix.

CH: L'initiative populaire pour l'internement à vie des délinquants sexuels ou violents jugés très dangereux est acceptée: elle a recueilli 56,2% des voix et a été approuvée dans 21,5 cantons! Seuls Bâle Ville et Vaud ont voté majoritairement non -- de très peu. C'est la surprise du jour, car le dossier gouvernemental semblait solide et les initiants paraissaient un peu égarés... De quoi alimenter les commentaires sur le décalage entre les élites et le peuple: c'est la Suisse bushiste et blochérienne qui s'est exprimée!

GE: La suppression de la taxe sur l'acquisition d'un logement est accepté par 59,43%.

GE: La modification d'une loi en vue de permettre aux locataires d'acheter leur logement est refusée par 54,66%.

GE: La suppression de l'impôt sur les successions pour les conjoints et descendants en ligne directe est approuvée par 74,57%.

Pour les votations cantonales genevoises, la droite appelait à voter 3 x oui, la gauche 3 x non... Le peuple a préféré se dire qu'il n'y avait pas de mal à se faire (potentiellement) du bien (et tant pis pour la baisse des recettes), mais a eu peur de la menace de la vente forcée de l'appartement loué (et les droits conférés aux locataires en font un statut sans problème).

Traditionnellement, après les résultats, chacun tente d'interpréter le résultat en tirant la couverture à soi (pour Avanti, tout le monde va être d'accord que c'est l'ampleur de la facture, et le saupoudrage général, qui sont responsables de l'échec, mais les uns vont dire qu'il faut au moins réaliser les investissements routiers et les autres au moins ceux pour les transports publics...). Depuis quelques années, il y a un troisième round quelques semaines plus tard: l'analyse d'un sondage d'opinion sérieux sur les raisons du vote (seulement pour les questions fédérales).

Si le détail des résultats vous intéresse, voir ici sur le plan fédéral et les résultats complets à Genève.

6.2.04

Juppé / Chirac

Ce n'est pas que je nie la possibilité d'une relation affective, ou d'amitié, entre politiciens (aussi dissemblables soient-ils en l'occurrence -- ou probablement est-ce pour cela qu'ils sont si fascinés l'un par l'autre). Mais dans ce cas elle est passablement à sens unique:
-- L'amitié de Chirac pour Juppé aurait voulu qu'il le laisse refaire sa vie hors de la politique.
-- L'amitié de Juppé pour Chirac exige, elle, qu'il se sacrifie: que Juppé accepte sa peine et Chirac est condamné.

4.2.04

Visibilité des couples de même sexe

Le recensement 2001 en Grande-Bretagne contenait une question qui permet d'évaluer à quelque 80'000 les gays et lesbiennes qui tiennent à déclarer vivre en couple (40'000 foyers), avant même l'existence d'un statut officiel de partenariat. Les homosexuels des deux sexes confirment leur réputation de mobilité géographique: on les trouve (et ils s'affichent) davantage dans les grandes villes que les petites, et plus au sud qu'au nord... (Daily Telegraph, gratuit mais il faut s'enregistrer).

La visibilité au quotidien est certainement le moyen le plus sûr de faire reculer les préjugés: amis lecteurs et amies lectrices hétéros, avez-vous des couples de même sexe (ou des gays ou lesbiennes) parmi vos connaissances? Si vous répondez non, c'est qu'ils se cachent encore...

3.2.04

Israël et Palestine

Si l'annonce par Ariel Sharon du démantèlement des colonies à Gaza va dans le bon sens, la formulation, "Je pars du principe que dans le futur il n'y aura pas de juifs à Gaza", me paraît des plus malheureuses: il faut distinguer l'abandon de la prétention à conserver la souveraineté sur des territoires destinés à constituer l'Etat de Palestine des situations personnelles. De même qu'il y a des musulmans en Israël (et même certainement des Palestiniens), je ne vois ni comment ni pourquoi il n'y aurait pas des juifs et même des Israéliens vivant dans l'Etat de Palestine -- bien au contraire.

2.2.04

Réformisme musclé

En marge d'un billet d' Oliver Kamm sur les taxes universitaires, une réflexion intéressante sur l'action politique (réformer d'abord, c'est le résultat qui fera le consensus) et la référence à un fascinant exposé sur la révolution travailliste néo-zélandaise des années 80. Elle a jeté les bases d'une crédibilité économique et financière de gauche qu'ont appliqué avec succès Rubin, le secrétaire au Trésor de Clinton, et Brown, le Chancelier de l'Echiquier de Blair.

Rafraîchissant de lire le gouverneur de la Banque centrale néo-zélandaise expliquer comment, socialiste bon teint, il en est venu avec d'autres à constater l'échec de l'économie planifiée et à libéraliser de manière à la fois radicale et pragmatique, ne découvrant que par la suite la convergence avec un Hayek...

1.2.04

Armes de destruction massive: une nouvelle enquête?

C'est assez paradoxal: après avoir récusé le rapport du juge Hutton qui ne leur donne pas satisfaction parce qu'il ne condamne pas Blair, les mêmes milieux réclament néanmoins une autre enquête indépendante! Cette fois sur la qualité pour le moins défectueuse (après coup, c'est plus facile à constater) des informations fournies aux autorités responsables par les services de renseignement occidentaux -- et vraisemblablement sur ce qu'ils appellent les "vraies" raisons de l'intervention.

Curieuse, cette obsession de penser qu'il existe une réponse unique, "judiciaire", qui soit la vérité vraie, à une question de nature éminemment politique et soumise, au Royaume-Uni en tout cas, à un débat minutieux et complet où les arguments du gouvernement ont été dûment soumis à la critique féroce de ses adversaires à l'extérieur comme à l'intérieur même du Labour. C'est l'histoire qui jugera -- et fera apparaître les Chamberlain et Daladier d'aujourd'hui.

Dans le débat similaire qui a lieu aux Etats-Unis, InstaPundit relève que les enquêtes en cours à la CIA et au Congrès confirment que l'erreur provient bien des services de renseignement eux-mêmes (et non de supposées pressions politiques). Et il souligne ironiquement que c'est en réalité une longue tradition: incapacité de prévoir la chute de l'Union soviétique, par exemple. Un de ses lecteurs fait remarquer qu'il y a une différence entre se tromper et donner des informations viciées, ce qui est moins démontrable à propos d'un fait négatif que d'un fait positif.

COMPLEMENT DU 05.02: La nouvelle enquête démarre, mais évidemment les adversaires de l'intervention ne sont pas encore satisfaits: si vous lisez l'anglais, voyez à ce propos le billet de Norman Geras.

Gauche: ce que je crois (ébauche)

Quand j'ai besoin de me rassurer sur mon positionnement idéologique, le commentaire quotidien du Cato Institute (un think tank américain de droite) m'est parfois bien utile. J'avais déjà une fois signalé, à l'intention de ces gens qui croient sincèrement être de gauche en s'opposant à l'intervention en Irak, ce qu'était vraiment une position de droite sur la question. Le billet d'aujourd'hui me permet, par réaction, de mieux comprendre et exprimer où je me situe.

Gene Healy dénonce le "Plus d'Etat conservateur" comme le fait aussi régulièrement Andrew Sullivan, en s'en prenant avec truculence à la politique intérieure de Bush qui creuse les déficits et multiplie les initiatives étatiques pour faire avancer les idées conservatrices (1,5 milliard de dollars pour des consultations conjugales fédérales, alors que le mariage est aux USA une compétence des Etats!), aux antipodes de ce que le commentateur appelle l'aile Goldwater-Reagan du parti républicain -- et de Bill Clinton qui a, lui, proclamé dans un discours sur l'Etat de l'Union "la fin du plus d'Etat".

De même qu'il y a ainsi deux droites, celle traditionnellement identifiée au "moins d'Etat" (Thatcher), et celle qui est à l'aise dans l'Etat (Bush, et bien sûr la droite en France, où Madelin incarne pratiquement seul la variété libérale), il y a deux gauches. On assimile immédiatement celle-ci à des impôts plus élevés (à des fins redistributrices autant que pour financer d'ambitieux programmes en tous genre), à l'appel à l'Etat pour imposer des solutions générales et uniformes à tous problèmes, mais il y a aussi ce que l'on a appelé en France la deuxième gauche (Michel Rocard), aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne la troisième voie (Clinton, Blair) et que j'appelle simplement la gauche libérale: une gauche qui croit que c'est le contenu de la dépense qui distingue la gauche de la droite, pas son montant plus ou moins élevé, une gauche décentralisatrice qui cherche d'abord à donner aux individus les moyens de leur autonomie (et ce qui la distingue de la droite anti-étatiste, avec laquelle je ne doute néanmoins pas que des convergences sont possibles sur certains points, c'est la conviction qu'il y a des inégalités de nature à compenser, et que l'individu est plus fort dans la solidarité avec d'autres que seul contre tous) plutôt que de les enchaîner dans des systèmes clientélistes (comme la droite et la gauche étatiste). C'est la gauche qui a créé les mouvements d'éducation populaire ou les coopératives, une capacité d'auto-organisation bien plus importante que la meilleure des solutions étatiques.

Oui, une autre gauche est possible, du moins je veux le croire.

Habermas sur l'antisémitisme, la Turquie dans l'UE et le voile

Une intéressante interview dans Le Monde d'aujourd'hui (même si je trouve qu'il reste à la surface et dans le passé à propos de l'antisémitisme de gauche, qui devrait être une préoccupation très actuelle).

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